INTERVIEW Laurent Langlard porte-parole de la CGT-Mine-Energie estime que le candidat du PS à la présidentielle a commis une erreur industrielle et politique en s’engageant à fermer 24 réacteurs nucléaires.
Que pensez-vous de l’accord passé entre le Parti Socialiste et Europe-Ecologie Les Verts ?
Cet accord prévoit la fermeture de 24 réacteurs nucléaires. C’est une mesure arbitraire sur laquelle nous avons de grosses craintes. Si on ne considère que ceux qui travaillent directement dans ces centrales, la fermeture de 24 sites entraînera la perte d’emploi pour 20.000 salariés d’EDF et 20.000 prestataires.
Le démantèlement et le recours à d’autre type d’énergie ne va-t-il pas créer d’autres emplois ?
Les « green jobs », on en parle depuis des années. Mais on ne voit rien venir ! Quant au démantèlement, c’est une vue de l’esprit. D’abord, les métiers du démantèlement sont des métiers spécifiques très différents de ceux d’une centrale en activité. Ensuite, une fois qu’on a désactivé le réacteur en retirant éléments les plus faciles à retirer, on a le temps de faire le démantèlement… A Brénilis, le démantèlement a commencé il y a plus de 25 ans. Il est bloqué par les écologistes. De plus, il y a un problème de coût. Même si EDF a provisionné de quoi assurer le démantèlement, il n’a pas provisionné pour une fermeture de 24 sites dans un temps aussi court.
La filière nucléaire est-elle menacée ?
Officiellement non. En réalité, les Verts s’opposent à ce qu’on brûle les déchets. Ils se sont opposés à Superphénix qui permettait de recycler les déchets. Ils s’opposent aujourd’hui au Mox qui est une façon de brûler les déchets. Mais d’un autre côté, ils ne veulent pas non plus qu’on les enterre. Il y a là une contradiction qui relève davantage du dogme que d’une réalité économique. Cet accord est un pas dans la direction de l’arrêt du nucléaire.
Vous avez été entendu par le PS ?
Non. Nous n’avons même pas été reçus ! La CGT a demandé à être entendue par tous les partis. Tous ont accepté, sauf deux : l’UMP et le PS. Même les Verts nous ont reçus.
Allez-vous en tirer une leçon électorale ?
Les électriciens et les gaziers, plus les retraités, représentent 500.000 voix. Apparemment, le PS a choisi de les ignorer pour des raisons qui sont industriellement non fondées. Il y a d’autres partis de gauche qui se sont positionnés différemment pour la sauvegarde de notre industrie.
Pensez-vous que vous pesez plus que les Verts ?
Le lobby vert est surévalué par rapport à la réalité. Les Français sont évidemment très attachés à l’environnement mais ils ne le voient pas comme une couleur politique. J’observe que l’accord que les Verts ont obtenu leur permet de se soustraire au résultat des élections puisqu’ils sont assurés d’avoir des députés aux prochaines législatives quel que soit leur poids réel dans la société.
Propos recueillis par Paul Loubière